Srpska arheologija / Serbian Archaeology

CouncilEurope

Convention européenne pour la protection
du patrimoine archéologique (révisée)
(STE n° 143)

English

source: http://conventions.coe.int/Treaty/FR/Reports/Html/143.htm


Rapport explicatif

A. Introduction

La Convention européenne pour la protection du patrimoine archéologique (révisée) témoigne de l'évolution des pratiques archéologiques en Europe. Elle remplace la convention initiale de 1969 en introduisant des conceptions et des idées qui sont devenues une pratique courante. La Convention révisée tire la leçon de vingt-deux ans d'expériences de mise en oeuvre de la Convention originelle et insère des dispositions destinées à remédier aux lacunes et à renforcer la coopération européenne.

a. La Convention de 1969

Cette Convention concerne principalement les fouilles et les informations que l'on en tire. Elle est entrée en vigueur le 20 novembre 1970. Les parties sont (en 1991): l'Autriche, la Belgique, Chypre, le Danemark, la France, l'Allemagne, la Grèce, l'Islande, l'Italie, le Liechtenstein, le Luxembourg, Malte, le Portugal, l'Espagne, la Suède, la Suisse, le Royaume-Uni, la Bulgarie, le Saint-Siège, l'URSS et la Yougoslavie.

b. Recommandation no R (89) 5

Alors que dans les années 60 les fouilles clandestines apparaissent comme la principale menace pour le patrimoine archéologique, dans les années 80 ce sont les grands projets de construction. La population, le niveau de vie, mais aussi le nombre et la complexité des projets se sont accrus: grands travaux (autoroutes, métros et trains à grande vitesse, remaniement des centres urbains anciens, parcs de stationnement, etc.) ou interventions dans la nature (reboisement, consolidation des sols, etc.). Du fait de leur échelle, ces opérations comportent des risques pour la découverte et la protection du patrimoine archéologique. Tout un arsenal juridique est en cause: lois spécifiques sur les matériaux archéologiques, lois générales relatives au patrimoine culturel, lois sur l'environnement, l'urbanisme, les travaux publics, les permis de construire, etc.

La recommandation, adoptée par le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe, s'appuie sur les pratiques en cours depuis plusieurs années pour préconiser: la constitution d'inventaires et de banques de données que les professionnels chargés du patrimoine archéologique puissent communiquer aux aménageurs; la mise en place de structures administratives capables d'intervenir sur les projets touchant les données archéologiques; l'adoption des mesures juridiques et administratives nécessaires pour que les données archéologiques soient prises en compte tout naturellement dans l'urbanisme et l'aménagement; le développement de nouvelles méthodes de travail pour les grands travaux; l'éveil du public à la valeur du patrimoine archéologique comme élément majeur de l'identité culturelle européenne.

c. Révision de la Convention

Le Comité restreint d'experts du Conseil de l'Europe sur l'archéologie et l'aménagement, lors de sa réunion d'octobre 1988, a estimé que, depuis l'ouverture de la Convention à la signature en 1969, les problèmes de sauvegarde et d'enrichissement du patrimoine archéologique avaient beaucoup changé en Europe et qu'il fallait donc réviser la convention pour donner aux textes plus de cohérence et d'ampleur. L'étude de la convention issue de cette réunion a noté de grands changements dans le contexte scientifique et économique de l'archéologie. En particulier, le recours intensif aux fouilles a cédé le pas à toute une série de techniques - prospection géophysique, exploitation des images par satellite, analyses de laboratoire - pour l'étude du passé de l'humanité. Aujourd'hui, les fouilles ne sont plus que l'un des maillons de la chaîne des activités scientifiques qui constituent la recherche archéologique. En outre, le public marque de plus en plus d'intérêt pour son passé. C'est une recherche d'identité, un droit fondamental des peuples, qui peuvent être satisfaits grâce à des spécialistes - les archéologues - capables d'interpréter l'information et d'aider le public à retrouver son patrimoine.

La proposition d'élaborer une Convention révisée et de dénoncer la Convention de 1969 a été soutenue par le Comité directeur pour la conservation intégrée du patrimoine historique (CDPH) et approuvée par le Comité des Ministres. Cette révision a été reprise par le Comité restreint d'experts sur l'archéologie et l'aménagement.

Les activités du Comité restreint d'experts sur l'archéologie et l'aménagement se sont déroulées depuis juin 1990 dans le cadre du programme du Comité du patrimoine culturel (CC-PAT), qui a succédé en 1990 au Comité directeur pour la conservation intégrée du patrimoine historique.

Après examen et approbation par le Comité du patrimoine culturel le 26 juin 1991, le projet de convention a été soumis au Comité des Ministres qui l'a à son tour adopté à la 465e réunion des Délégués des Ministres.

La convention a été ouverte à la signature des Etats membres le 16 janvier 1992 lors de la 3e Conférence européenne des ministres responsables du patrimoine culturel à Malte.

B. Commentaire sur les articles de la Convention révisée

Préambule

Le préambule apporte plus qu'une aide à l'interprétation de la Convention révisée. Il place celle-ci dans le cadre des activités du Conseil de l'Europe relatives au patrimoine culturel, depuis l'entrée en vigueur de la Convention culturelle européenne. L'Assemblée parlementaire, par exemple, a adopté des recommandations sur le patrimoine culturel sub-aquatique, sur le recours aux détecteurs de métaux et sur la circulation des oeuvres d'art.

Le préambule souligne aussi les problèmes auxquels est confrontée la conservation du patrimoine archéologique dans les zones géographiques exposées aux grands projets d'aménagement. Ces projets, qu'ils visent le redéploiement de zones bâties ou la mise en exploitation de friches, ont souvent de profonds effets sur le patrimoine, qui demeure pourtant un «élément essentiel pour la connaissance du passé des civilisations». Enfin, le préambule souligne la nécessité d'une action commune des Etats européens.

Article 1

La Convention révisée se propose de mettre en évidence l'importance scientifique du patrimoine archéologique. Précédemment, on fouillait les sites et les monuments archéologiques afin d'en retirer les objets que l'on plaçait dans les musées et dans les galeries d'art. Aujourd'hui encore, beaucoup regardent ce patrimoine comme une source de profit commercial. Les Etats doivent veiller à empêcher ce genre de fouilles. La Convention révisée a donc le même but que la Charte pour la protection et l'aménagement du patrimoine archéologique, élaborée par le Conseil international des sites (ci-après dénommée «Charte Icomos»), qui dispose que «la connaissance archéologique est fondée principalement sur l'étude scientifique du patrimoine archéologique», et les fouilles sont un dernier ressort dans cette recherche. Cela ne veut pas dire que le patrimoine doive rester inviolé, mais grâce aux techniques scientifiques, qu'elles soient ou non destructrices, le patrimoine peut renseigner sur l'évolution de l'humanité en Europe et être une «source de la mémoire collective européenne».

La Convention révisée commence par une définition générale dont l'essence se trouve dans la convention de 1969, mais a été affinée dans la Convention révisée. Les mots «éléments du patrimoine archéologique» soulignent que ce ne sont pas seulement les objets qui ont de l'importance. Tout témoignage, de quelque nature qu'il soit, capable d'éclairer le passé de l'humanité est important. Si ce témoignage répond aux critères exposés au paragraphe 2, c'est un élément du patrimoine archéologique. Il y a trois critères: premièrement, il doit y avoir quelque chose, fût-ce une trace, qui vienne du passé de l'homme; deuxièmement, cet élément doit pouvoir faire avancer la connaissance de l'histoire et des relations de l'homme avec son milieu naturel: troisièmement, cet élément doit procéder essentiellement d'une étude de caractère archéologique ou d'une découverte délibérée. Le paragraphe 3 donne des exemples des éléments qui s'inscrivent dans le patrimoine archéologique. Il faut souligner que cette liste n'est pas exhaustive; elle énumère des catégories de patrimoine qui couvrent une très large série de biens, incluant par exemple tant les sites funéraires que les fortifications urbaines.

Le même paragraphe souligne que le contexte où ces éléments se trouvent a pour le patrimoine archéologique la même importance que les éléments eux-mêmes. Tirés de leur contexte, les objets perdent souvent toute leur valeur scientifique. D'ailleurs, les traces d'enquêtes archéologiques ont souvent autant d'importance que les objets et c'est ce qui est précisé dans la définition. Par exemple, il peut arriver qu'une structure de bois ne laisse d'autre trace qu'une décoloration dans le sol, mais un chercheur averti peut en tirer beaucoup de renseignements. La nature de la recherche archéologique n'est pas précisée dans la Convention révisée. Sans doute pense-t-on immédiatement aux fouilles, mais c'est le dernier stade de cette étude. Il convient de commencer par un relevé, puis d'appliquer les techniques non destructrices et les moyens d'échantillonnage avant d'en venir aux fouilles.

La liste des éléments énumérés au paragraphe 3 montre qu'ils font partie du patrimoine archéologique, qu'ils se trouvent sur terre ou sous l'eau. Il faut préciser quant au troisième critère du paragraphe 2 que l'élément intéressant le passé de l'homme doit se trouver dans la zone territoriale d'un Etat. Il s'agit simplement de rappeler un fait inhérent à toute convention internationale. A cet égard, la zone territoriale d'un Etat dépend de cet Etat et plusieurs possibilités apparaissent. La zone territoriale peut s'étendre à la zone territoriale maritime, à sa zone contiguë, au plateau continental, à la seule zone économique ou à une zone de protection culturelle. Quelques-uns des Etats membres du Conseil de l'Europe restreignent leur juridiction sur les épaves, par exemple à la zone territoriale maritime. D'autres l'étendent à leur plateau continental. La Convention révisée reconnait ces différences sans se prononcer pour l'une ou pour l'autre.

Article 2

La principale exigence de cet article est que les Etats doivent instituer un système juridique de protection du patrimoine archéologique. Tous les Etats membres du Conseil de l'Europe ont certes un dispositif de ce genre, mais ils diffèrent beaucoup par leur nature et par l'étendue de la protection qu'ils assurent. L'article expose aussi certaines dispositions qui devront figurer dans la législation.

La première est une disposition qui demande, d'une part, qu'il existe un inventaire du patrimoine archéologique et, d'autre part, que les monuments et les zones protégées soient classés. Ce sont des éléments essentiels de planification, parce qu'ils permettent de prendre en compte le patrimoine archéologique au stade même de la formulation des projets. L'inventaire a donc beaucoup d'intérêt. Les objets une fois trouvés, il convient de les inscrire dans un inventaire avec leurs tenants et leurs aboutissants, afin que l'on puisse les suivre le cas échéant. Il est alors facile de diffuser la description d'un objet volé et de le retrouver. Le classement des monuments et des zones protégées est utile lorsqu'on ne conndit pas l'étendue d'un site ou d'un monument. La Convention révisée ne précise pas la taille d'une zone ainsi protégée ou les activités qui doivent y être interdites. Il appartient à l'Etat d'en décider selon les circonstances et les sites.

Les réserves archéologiques sont soumises à des restrictions qui préservent le patrimoine archéologique contenu dans leur enceinte. La recommendation de l'Unesco du 19 novembre 1968 concernant la préservation des biens culturels mis en péril par les travaux publics ou privés dispose à l'article 24.a que «les réserves archéologiques devraient faire l'objet de mesures de classement ou de protection et éventuellement d'acquisitions immobilières, afin qu'il soit possible d'y effectuer des fouilles approfondies ou de préserver des vestiges qui y ont été découverts». L'article 2 de la Convention révisée tend à préserver le patrimoine pour que les générations futures puissent en bénéficier. Il convient de le lire en liaison avec l'article 4, paragraphe i. La création de réserves ne signifie pas que tout usage du sol soit interdit. Normalement, elle signifie que les opérations éprouvantes pour le sol sont interdites ou soumises à l'aval des autorités compétentes. Toute fouille doit faire l'objet d'un examen rigoureux tenant compte des objectifs scientifiques.

L'auteur d'une découverte fortuite doit communiquer celle-ci auxdites autorités. Cette disposition ne concerne pas la propriété du bien. Il faut donc non seulement faire connaître la découverte dans la manière prescrite, mais aussi la soumettre à l'examen afin qu'elle figure dans l'inventaire précité et que sa valeur scientifique puisse être extraite.

Un Etat, toutefois, peut n'exiger une telle communication de la découverte fortuite que pour des matériaux précieux ou s'agissant de sites d'ores et déjà classés.

Article 3

L'article 3, paragraphe I, demande à chaque Etat partie à la Convention révisée de réglementer la conduite des activités archéologiques sur terrains publics ou privés. Il est d'usage dans le monde entier qu'un permis soit exigé de la personne désireuse d'exercer ces activités.

Ce permis impose des conditions de contrôle des activités. Il s'agit ainsi de limiter les dégâts causés au patrimoine archéologique au strict nécessaire pour la connaissance scientifique. Les fouilles qui n'auraient d'autre but que la mise au jour de métaux ou objets précieux ne sauraient être admises. L'article 3, paragraphe i, précise que le dispositif doit s'appliquer à l'Etat aussi bien qu'aux archéologues privés. Les services de l'Etat doivent aussi respecter cette procédure. De plus, l'article souligne que les fouilles doivent être considérées comme l'ultime recours en matière de recherche et non comme la méthode normale. Les techniques non destructrices doivent s'appliquer, dans la mesure du possible, comme il est suggéré dans la Charte Icomos.

Dès que le patrimoine archéologique est exposé, il commence à se dégrader. La vitesse de dégradation dépend des matériaux et des degrés d'exposition. Beaucoup de conservateurs considèrent comme un vandalisme une fouille qui n'est pas spécialement prévue pour la conservation. Par conséquent, lorsque les fouilles sont nécessaires pour résoudre un problème scientifique, il faut prévoir des moyens de conservation et arrêter un plan de gestion des découvertes ainsi que de ce qui reste du site. Il convient de nettoyer et d'emmagasiner les objets de façon qu'ils puissent servir aux futures générations de chercheurs. Autrement dit, il doit y avoir un dépôt comportant une base de données sur les fouilles ou les découvertes. Le site des fouilles peut encore contenir des matériaux intéressants pour de nouvelles fouilles et il faut donc les couvrir ou les conserver. La Convention révisée, en son article 3, paragraphe i, demande que le régime imposé par l'Etat aux activités archéologiques tienne compte de ces aspects. Cet article doit être lu en liaison avec l'article 4.

L'article 3, paragraphe ii, demande que les procédés destructeurs ne soient mis en oeuvre que par des personnes qualifiées et spécialement habilitées, ce qui ne veut pas dire que d'autres personnes ne puissent participer aux fouilles. Elles devraient simplement être placées sous la direction d'une personne qualifiée responsable des fouilles. D'ailleurs, les non-professionnels ont beaucoup contribué au développement des connaissances en participant aux fouilles archéologiques.

L'article 3, paragraphe iii, réglemente l'obligation des Parties de soumettre les usagers de détecteurs de métaux à une licence ou à un enregistrement. Premièrement, cette obligation s'applique aux cas prévus par le droit interne. Deuxièmement, l'autorisation préalable de l'usage «de détecteurs de métaux et d'autres équipements de détection»

s'applique à la recherche archéologique.

Le recours immodéré aux détecteurs de métaux entraine une perte substantielle du patrimoine archéologique. Ainsi, lorsqu'un objet est décelé par la machine, l'envie de fouiller devient irrépressible. Il n'y a pas moyen de savoir a priori si la trouvaille aura une grande importance archéologique ou sera un rebut du XXe siècle. Dans l'un et l'autre cas, le sol est bouleversé et toute substance et trace non métalliques sont détruites. Cette disposition vise la recherche d'objets archéologiques sur les terrains publics et privés. L'expression «et d'autres équipements de détection» vise les matériels de même usage comme les ultra-sons et le radar au sol.

Article 4

Alors que les articles 2 et 3, paragraphe i, concernent la mise en place de systèmes juridiques et administratifs capables de ménager des réserves archéologiques et de conserver et gérer les sites et les objets fouillés, l'article 4 oblige l'Etat à prendre des mesures de préservation physique en ce domaine. En dépit des termes «suivant les cir- constances», cet article oblige l'Etat à consacrer des ressources fiscales et humaines aux tâches voulues. L'Etat est tenu de faire en sorte que les pouvoirs publics comprennent la nécessité de constituer des réserves archéologiques et de prendre des mesures à cet effet. C'est une obligation continue, car la création d'une réserve n'est pas autre chose que le début d'une phase d'entretien.

Dans le paragraphe i de l'article 4, l'expression «protection par d'autres moyens appropriés» vise l'utilisation de mesures de planification physique et d'aménagement.

Article 5

Cet article expose les idées et les pratiques contemporaines sur les relations entre les projets d'aménagement et la préservation du patrimone archéologique.

L'Etat est tenu de faire intervenir les archéologues dans tout le processus de planification et de veiller à ce que les archéologues, les urbanistes et les aménageurs du territoire se consultent. Lorsque l'environnement est en cause, ils doivent examiner les sites archéologiques et leur cadre. C'est ainsi que les sites connus ou présumés peuvent être pris en compte dans les projets de construction. Il est souvent facile d'intervenir au stade de la planification alors que la perte de temps et d'argent serait considérable plus tard. Les dispositions de l'article 7 sont très pertinentes ici. Seule la mise à jour des relevés, des inventaires et des cartes des sites archéologiques permet un véritable travail de consultation.

Dans certains cas, la décision peut être prise de lancer le projet, même si un aspect du patrimoine archéologique en est endommagé. La Charte Icomos stipule que dans ce cas les fouilles doivent avoir lieu. L'article 5, paragraphe ii.b, énonce ce principe et demande à l'Etat de faire en sorte que la consultation ait lieu de façon à réserver le temps voulu pour «une étude scientifique convenable du site» et que les fonds nécessaires soient dégagés. Les sources de ces fonds sont indiquées à l'article 6.

Naturellement, il peut se faire qu'un site apparaisse lors de travaux d'aménagement. L'article 5, paragraphe iv, recommande la conservation in situ autant que possible, selon la nature du site et de l'aménagement. On peut par exemple fouiller le site et en couvrir les vestiges de façon que la construction soit possible par-dessus. Le site est ainsi pris en compte et maintenu à la disposition des futurs chercheurs. Dans d'autres cas, il est possible de construire autour du site de façon à laisser les fouilles à l'air libre et disponibles pour le public. Sur ce point, le paragraphe v souligne encore la nature scientifique des sites archéologiques.

L'article 5, paragraphe v, reconnait le droit pour le public d'accéder aux sites archéologiques, mais ce ne doit pas être aux dépens du caractère archéologique et scientifique de ces sites et de leur environnement. Les dispositions prises en faveur du public doivent en tenir compte.

Les constructions ne doivent altérer ni le paysage ni la situation du site en modifiant le cours des eaux, le régime des vents, la diffusion de la lumière solaire, etc.

Article 6

Cet article traite du soutien financier à la recherche archéologique. L'organisation de cette recherche et sa gestion diffèrent selon les pays. L'article 6 en tient compte en demandant une aide financière aux pouvoirs nationaux, régionaux et locaux selon leurs compétences. Cependant, l'essentiel est que la convention révisée demande à chaque Etat partie de soutenir financièrement la recherche archéologique quelle qu'en soit l'origine.

Le paragraphe ii de cet article est significatif puisqu'il confère aux responsables des projets de construction le soin de financer les activités archéologiques nécessitées par ces projets. Ce point apparaît dans la recommandation de l'Unesco du 19 novembre 1968 concernant la préservation des biens culturels mis en péril par les travaux publics ou privés, dans la Recommandation no R (89) 5 du Conseil de l'Europe et dans la Charte Icomos. Selon la Convention révisée, le patrimoine archéologique est «une source de la mémoire collective européenne» et, aux termes de la Charte Icomos, est «commun à toute la société humaine». Il doit donc être protégé, mais le coût de cette protection ne doit pas incomber au public si ce coût est dû à un profit accru pour les intérêts privés. Les bénéficiaires des travaux de construction doivent aussi préserver les lieux que leurs activités ont dérangés.

Les grands travaux publics ou privés doivent inscrire dans leur budget le travail de relevé archéologique et l'enregistrement complet des trouvailles au même titre qu'ils doivent procéder à des études d'impact sur l'environnement.

En conséquence, des dispositions doivent être prises permettant la possibilité de fouilles archéologiques comme l'indique l'article 5 et de manière que le coût en soit entièrement pris en charge à partir de financements publics ou privés suivant les circonstances. Ce coût comporte le relevé «complet» et la publication des trouvailles, à savoir les stades de travail, même postérieurs aux fouilles. Par conséquent, le budget doit prévoir les moyens. de recueillir les données et d'en évaluer le potentiel, et doit préciser la nature des études à venir. Vient ensuite la phase d'analyse des données qui doit commencer par l'archivage des recherches et l'établissement de catalogues et de rapports sur le détail des travaux de stratigraphie, les objets trouvés et leur environnement. Enfin, la documentation sur les archives de la recherche doit donner lieu à un rapport.

Article 7

La nécessité de mettre à jour les relevés, les inventaires et les cartes des sites archéologiques, inscrite à l'article 7, paragraphe i, a déjà été illustrée sous l'article 5. Il est impossible de lancer des projets d'aménagement sans ces informations. Il s'agit de procéder à une action préventive.

Comme il est dit dans la Charte Icomos, la fouille d'un site archéologique entraine «la nécessité de trier les témoignages à retenir et à préserver au risque de perdre d'autres informations et peut-être même de détruire totalement le monument». Le site ne peut, en effet, jamais être reconstitué dans sa totalité. Comme la fouille ne doit avoir d'autre objet que scientifique, il incombe au directeur des fouilles de diffuser les informations qu'il en a tirées.

La diffusion des informations est également indispensable pour atteindre d'autres objectifs de cette convention, comme l'éducation du public prévue à l'article 9.

Normalement, les informations sont fournies par la publication des résultats, mais longtemps après le travail archéologique lui-même. En effet, ce travail implique de nombreux spécialistes dont il convient de combiner et analyser les contributions. L'article ne va pas jusqu'à exiger la publication, mais demande aux Etats de prendre «toutes les dispositions pratiques» pour faire publier, premièrement, une synthèse scientifique ou un rapport préliminaire de l'intervention archéologique et, deuxièmement, une étude définitive complète. La première mesure consiste à communiquer les découvertes faites pendant les travaux, la seconde à procéder à l'analyse comparative des résultats.

Article 8

Cet article traite de la diffusion des informations tirées des travaux sur le patrimoine archéologique. La première méthode consiste à procéder à des échanges d'éléments du patrimoine archéologique que les Etats sont tenus de faciliter. Cela peut être essentiel à divers titres. Les objets aident à la formation des futurs archéologues et autres spécialistes. Les échanges servent aussi à soumettre les éléments du patrimoine archéologique à un examen scientifique plus poussé que ne le permettrait par exemple l'usage d'équipements rares et coûteux. Ces échanges entre archéologues et instituts de recherche scientifique sont donc essentiels pour l'archéologie. Il appartient à l'Etat de lever les obstacles à ces échanges nationaux ou internationaux. Le présent article fait obligation à l'Etat d'oeuvrer pour rétablir un climat propre aux échanges, par exemple par des arrangements bilatéraux et des procédures qui les facilitent.

Le second aspect de la diffusion est l'engagement de la part de l'Etat à faciliter l'échange des données des recherches et des fouilles archéo- logiques en cours. Or, une découverte dans un Etat est souvent fort importante pour la recherche dans d'autres. De même, la deuxième disposition de l'article 8, paragraphe ii, l'organisation de programmes internationaux de recherches, facilitera la concertation pour résoudre les problèmes scientifiques qui se posent dans plusieurs Etats.

Article 9

L'article 9, paragraphe i, touche au problème crucial de la sensibilisation du public. Tout travail archéologique bénéficie au public en lui montrant d'où les hommes viennent et pourquoi ils sont tels qu'ils sont. C'est par ce travail que l'histoire est connue et que les créations des civilisations passées sont mises en lumière. Depuis longtemps, le public s'intéresse beaucoup à ces questions. Il faut à la fois nourrir et élargir l'intérêt du public. Non seulement cette démarche accrdit l'éducation et la connaissance, mais elle contribue à mieux protéger le patrimoine archéologique. Un public conscient de la valeur de son patrimoine est moins enclin à l'endommager ou à le détruire. Il est même prêt à consacrer une part de ses ressources à poursuivre le travail de recherche sur le patrimoine.

Pour bien apprécier la valeur du patrimoine archéologique, le public doit avoir accès aux sites et aux objets. C'est essentiel pour le processus éducatif et pour faire comprendre les origines et l'évolution des sociétés modernes. La Charte Icomos stipule que «la présentation et l'information doivent être conçues pour une interprétation populaire de l'état actuel des connaissances et doivent donc être révisées fréquemment pour tenir compte des diverses manières d'aborder la compréhension du passé».

Ayant affirmé que le public a un droit d'accès au passé par l'intermédiaire du patrimoine archéologique, il faut aussi reconnaître que dans certaines circonstances cet accès doit lui être refusé pour la préservation du patrimoine. C'est ainsi que certaines grottes contenant des peintures rupestres préhistoriques ont été fermées parce que la présence du public élève de manière dommageable la teneur en humidité et en bactéries. Lorsqu'il faut interdire l'accès, il convient de rechercher d'autres moyens de présenter les sites, par exemple par des reproductions en grandeur réelle ou par d'autres supports de communication.

Article 10

Cet article fait obligation aux Etats parties à la Convention révisée de prévenir la circulation illicite des éléments du patrimoine archéologique. Ici, la «circulation illicite» vise le commerce d'objets provenant de fouilles illicites ou illégalement faites dans des fouilles officielles. Les premières sont en contravention avec la procédure requise en vertu de l'article 3, paragraphe i. Les fouilles officielles sont celles qui ont été autorisées. Il est impossible d'empêcher tous les prélèvements d'éléments du patrimoine archéologique sur ces sites à moins de surveiller plus étroitement les personnes. Même dans ce cas, la protection ne serait pas totale. La valeur marchande de nombreux objets trouvés en Europe est telle que la tentation fait fi des sanctions et des protections. La meilleure arme contre les activités de cette nature consiste à éduquer le public, en particulier en lui montrant qu'en séparant l'objet de son contexte, on détruit la valeur scientifique de cet objet et on endommage le site d'où il provient. Pour lutter contre la circulation illicite des objets, les Etats peuvent coopérer en s'informant les uns les autres et en signalant l'apparition d'un objet suspect sur le marché.

Dans ces conditions, l'article 10 demande aux Etats de prévoir l'échange des informations sur les fouilles illicites. En recueillant ces renseignements, l'Etat doit appliquer les lois relatives au respect de la vie privée et s'engager à informer les autres Etats membres des offres d'objets soupçonnés de provenir de fouilles illicites ou d'avoir été détournés illégalement de fouilles officielles. Ces contraintes n'obligent pas l'Etat à engager une action pour s'informer sur les fouilles illicites ou les offres suspectes. l'Etat est tenu de prendre les mesures indiquées seulement lorsque ces fouilles ou ces offres lui sont connues.

La restriction mise à l'article 10, paragraphe iii, est inscrite par de nombreux musées dans leur déontologie ou dans leurs statuts. Le Conseil international des musées, dans son Code d'éthique professionnelle de 1986, stipule qu'un musée ne doit pas acheter d'objets «lorsqu'il y a lieu de penser que leur découverte a entraimé une destruction ou un dommage non scientifique ou intentionnel récent pour les anciens monuments ou sites archéologiques ou si l'on a négligé d'aviser le propriétaire ou l'occupant du terrain ou l'autorité juridique ou publique compétente» (paragraphe 3.2). Dans de nombreux Etats, cette pratique a été adoptée par les musées privés et publics. Par conséquent, l'obligation faite par l'article 10, paragraphes iii et iv, aux Etats renforcera ces pratiques et contraindra les institutions qui n'ont pas arrêté leur position sur cette question à reconsidérer leur point de vue.

Lors de l'élaboration de la Convention révisée, certaines délégations ont observé que dans la pratique il peut arriver que les musées acquièrent des objets provenant de fouilles illicites en vue d'empêcher leur destruction. Il a été également reconnu que les dispositions de l'article 10 n'ont pas une portée rétroactive.

Article 11

Les principaux problèmes juridiques et pratiques à surmonter pour empêcher le trafic illicite des éléments du patrimoine culturel sont complexes. Ils échappent à une convention qui vise essentiellement le traitement des sites et la recherche archéologique. C'est pourquoi, à l'article 11, la Convention déclare qu'aucune de ces dispositions ne porte atteinte aux traités bilatéraux ou multilatéraux qui existent ou qui pourront exister entre les Parties. En d'autres termes, cette Convention ne saurait servir à interpréter, minimiser ou étendre ces traités.

A l'ouverture de la signature de la Convention révisée, les instruments en vigueur étaient notamment la Convention européenne sur les infractions visant des biens culturels préparée par le Conseil de l'Europe et ouverte à la signature en 1985. Une autre importante convention est celle de l'Unesco concernant les mesures à prendre pour interdire et empêcher l'importation, l'exportation et le transfert de propriété illicite des biens culturels (Paris, 14 novembre 1970). En avril 1991, 69 Etats en étaient signataires, notamment, parmi les membres du Conseil de l'Europe, Chypre, la Tchécoslovaquie, la Grèce, la Horigrie, l'Italie, le Portugal, l'Espagne et la Turquie. Sur les cinq Etats jouissant du statut d'invité spécial au Conseil de l'Europe, trois - la Bulgarie, la Pologne et la Yougoslavie - sont parties à la Convention de l'Unesco de 1970.

Les Etats d'Europe centrale et orientale peuvent être visés par l'Accord entre les Etats socialistes sur la coopération et l'entraide relatives aux moyens de détention et au retour des biens culturels illégalement trans- portés à travers les frontières (1986).

D'autres projets d'accords internationaux sont envisagés au moment de l'ouverture à la signature de la présente Convention révisée.

Article 12

Les dispositions relatives à l'assistance technique constituent l'un des bons moyens que les Etats peuvent mettre conjointement en ceuvre pour sauvegarder le patrimoine archéologique.

Le second paragraphe de l'article 12 traite du développement souhaitable des échanges de personnes entre les professions et les métiers intéressant la conservation du patrimoine archéologique. Il mentionne en particulier les responsables de la formation dans ses divers secteurs. La Charte lcomos a souligné que «toutes les disciplines doivent atteindre un haut niveau universitaire dans la gestion du patrimoine archéologique. La formation d'un nombre suffisant de professionnels dans les secteurs intéressés doit donc être l'un des principaux objectifs des politiques d'éducation dans tous les pays». Les spécialistes en question ne sont pas seulement les archéologues et les personnes associées directement à l'interprétation des données, mais aussi les personnes qui assurent la présentation des sites au public.

Les possibilités offertes par la formation en cours d'emploi semblent propices à une mobilité occasionnelle ou prolongée en ce sens. Il serait bon, le cas échéant, de modifier la réglementation nationale ou régionale de la formation en cours d'emploi. En dehors des stages, les règlements professionnels devraient, s'ils ne le font pas déjà, prévoir l'accueil des spécialistes qui souhaitent pratiquer leur métier ou leur profession dans d'autres pays que le leur.

Article 13

Pour que la convention révisée soit mise en oeuvre aussi efficacement que possible, il importe qu'un comité soit chargé d'en surveiller l'application. Un comité semblable a été mandaté pour le patrimoine architectural dans la Convention de protection du patrimoine architectural de l'Europe (1985).

Le comité établira périodiquement un rapport à l'intention du Comité des Ministres du Conseil de l'Europe portant sur la situation des politiques de protection du patrimoine archéologique dans les Etats parties à la Convention.

Le comité devra d'autre part proposer au Comité des Ministres des mesures propres à faciliter l'application de la Convention révisée. Ces mesures pourront être des propositions de recommandations adressées aux Etats membres - propositions concernant le programme de travail intergouvernemental du Conseil de l'Europe, ou relatives à la coopération internationale multilatérale et à l'information et à la motivation des Etats, des pouvoirs locaux et du public européen.

Le comité est également chargé de faire des recommandations au Comité des Ministres concernant l'invitation d'Etats non membres du Conseil de l'Europe à adhérer à la Convention révisée.

Articles 14 à 18

Les clauses finales figurant aux articles 14 à 18 sont fondées sur le modèle de clauses finales des conventions et accords du Conseil de l'Europe.





© 2002. Redakcija projekta "Srpska arheologija" i nosioci pojedinaènih autorskih prava.
Nijedan deo ovog sajta ne sme se umnožavati ili prenositi bez prethodne saglasnosti.


Hosted by uCoz